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Avec un nom pareil, il est facile d’imaginer Mononc’ Serge sur le bord d’une cheminée, les pieds bien au chaud dans ses pantoufles. C’est très mal connaître celui qui se plaît à se mettre en jeu depuis les années 90, disque après disque. Après une deuxième galette en 2008 en compagnie du groupe métal Anonymus, Serge Robert de son vrai nom se lance encore une fois dans une toute nouvelle aventure créative avec ce dixième album, Ça, c’est de la femme. Alors qu’il a l’habitude de signer textes et musiques – même avec Anonymus – l’homme délègue ici à Peter Paul, né Pierre-Luc Laflamme, une grande partie de la composition musicale. « Je voulais casser mes habitudes, m’éloigner d’un disque indiscipliné comme Serge blanc d’Amérique qui passe du rock à l’acoustique. J’avais envie d’unité, d’une thématique, d’un son. Au même moment, Peter Paul, mon guitariste qui m’accompagne en tournée, m’a contacté. Il avait des musiques pour moi. Je me suis rendu plusieurs fois chez lui pour télécharger sur mon ordinateur des airs de son quatre pistes, qui m’ont inspiré des textes. »

Au-delà du message
Le résultat est un album rock qui s’assume tant au niveau des guitares amplifiées que des textes qui dépeignent à la rigolade cet univers de rockeurs « qui signent s’es boules ». À travers ce filon rock se trouvent des textes vitriolés sur le joual, les chanteurs engagés et les vieux péquistes. Bien que Mononc’ Serge laisse aujourd’hui tomber ses chansons collées à l’actualité, le quadragénaire ne s’est visiblement pas assagi. Les thématiques à caractère intemporel révèlent toujours un ton personnel, ni tout à fait blanc, ni tout à fait noir, où les multiples niveaux de lecture osent même le ridicule et l’excès afin de susciter la réaction.

« La chanson “Vieux péquiste”, c’est un peu moi qui adhère encore à la cause. C’est le cauchemar du péquiste qui entend tout plein de voix contradictoires, comme c’est le cas actuellement. Cette chanson, on peut la prendre au second degré, mais curieusement, certains la prennent seulement au premier niveau. J’ai aussi des souverainistes anti-péquistes qui disent s’y reconnaitre. Bref, on peut faire plusieurs lectures de cette chanson et celle que j’ai voulu donner n’est pas nécessairement la bonne. Je suis comme ça. J’aime lâcher des ovnis dans la nature. Mon but premier n’est jamais de passer des messages. Au contraire, quand c’est trop appuyé, ça me repousse, » précise Serge.

Devenir Mononc’
Mononc’ Serge a beau être une bête hors de l’ordinaire, son personnage – à mille lieux d’un Serge Robert plutôt simple et introverti – se construit à coups d’expériences et d’inspirations bien enracinées dans la culture québécoise. À ses premières chroniques chantées qui revisitent les unes des journaux sur les ondes de CIBL en 1997, Mononc’ est alors inspiré par la prose en joual de Plume Latraverse et l’humour irrévérencieux de Rock & Belles Oreilles. Ces dernières années, c’est au niveau musical qu’il puise dans ce qui l’entoure. Il est renversé par un spectacle de Gros Méné, défunt groupe de Fred Fortin. L’amplification propre à ce groupe donne une direction à des chansons comme « Simone » sur 13 tounes trash en 2000. « J’ai développé un goût pour écrire des tounes distorsionnées. Et étrangement, ce sont celles qui ont le mieux réussi dans mon répertoire. »

Indépendant dans l’âme
Il est facile aujourd’hui de classer Mononc’ Serge parmi les indépendants, ces débrouillards qui réalisent le boulot d’une maison de disques par eux-mêmes. Choix ou nécessité? Pour Serge Robert, c’est le cours des choses qui explique cette façon de faire, ces sorties en autoproduction distribuées par DEP. « À mes débuts, je ne me voyais pas du tout dans le milieu de l’underground. Je me percevais plutôt comme un gars qui écrivait de la chanson. Je me voyais plus à Monique Giroux qu’au Café Chaos. Je n’avais pas soupçonné que ce milieu était aussi vivant. »

Sur un total de dix galettes, seuls trois albums ont été signés en tout début de carrière par une maison de disques, les défunts Disques Double – derrière Rendez-vous doux de Gerry Boulet et Miel et Venin de Marie Carmen. « Après trois disques, on m’a demandé d’écrire un album avec une chanson pour la radio. Ça m’a fait réfléchir. C’est alors que j’ai eu la possibilité de sortir le disque que je voulais tout en étant distribué par Brault et j’ai sauté sur l’occasion. Ironie du sort, 13 tounes trash a bien vendu, bien joué sur les ondes de Musique Plus et de Cool FM. J’ai alors réalisé que se produire soi-même, ce n’était pas sorcier. » Maître chez lui, Mononc’ Serge donnera vie sur scène à Ça, c’est de la femme cette année. Surpris de pouvoir encore incarner Mononc’, l’auteur-compositeur-interprète se sent comblé par ce chemin musical à l’image d’un personnage et d’une musique atypiques.