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Natif de Murdochville en Gaspésie, (François) Mario Labbé possède une feuille de route fort impressionnante. Après des études en communications à l’Université d’Ottawa, il organise des spectacles pour les Jeux Olympiques de Montréal (en 1976) ainsi que pour les Jeux du Commonwealth, avant de fonder sa compagnie de tournée en 1978. C’est en 1982 qu’il devient l’un des co-fondateurs de Gestion artistique mondiale, l’un des plus importants bureaux d’imprésarios au Canada, avec des agences à Montréal et à Toronto.
Imprésario en demande au cours des années 1980, il est le plus grand utilisateur privé de la Place des Arts (il y présente des spectacles 80 soirs par année) jusqu’à l’aube des années 1990. M. Labbé produit quelque 300 concerts et spectacles chaque année à travers le monde et aux alentours de 1 000 spectacles dans les plus grands théâtres du pays. Kiri Te Kanawa, les Chœurs de l’Armée rouge et les Ballets Kirov font partie des artistes qu’il fait découvrir au public canadien. Puis, en 1992, quelque peu blasé par l’univers du show-business, il décide de se consacrer corps et âme à sa maison de disques classique fondée en 1987 , Analekta. « J’avais envie de faire autre chose et d’investir dans cette compagnie qui marchait déjà fort bien. J’ai donc commencé à créer un important catalogue d’artistes canadiens, de musiciens qui n’avaient pas de maison de disques. Comme j’avais déjà investi pas mal d’argent dans cette entreprise, j’ai décidé de réorienter mes activités, » avance l’homme qui a pris depuis sous son aile des artistes de renommée internationale tels Alain Lefèvre, Daniel Taylor et Karina Gauvin.
Ce n’est qu’au début des années 2000, devant l’évolution de son catalogue, que M. Labbé décide de fonder les Éditions Analekta. Constatant qu’Angèle Dubeau et son ensemble, La Pietà, commandaient de plus en plus d’œuvres de compositeurs québécois, l’homme réalise le besoin de créer des éditions. Il s’explique : « Jusqu’à ce jour, on ne s’était pas soucié des éditions parce qu’on n’en sentait pas véritablement le besoin. Ce n’était pas notre core business, notre spécialité. Dès le point de départ, je savais qu’il s’agissait d’une activité marginale pour nous. Mais même si 90% de notre production faisait partie du domaine public, on produisait de plus en plus de musiques contemporaines et des musiques d’auteurs venant d’ici. Devant le besoin de récupérer une partie des investissements que l’on faisait en commandant des œuvres de compositeurs toujours vivants, on a senti qu’il était temps d’agir. »
Faisant paraître entre 25 et 30 nouveautés chaque année sous la houlette d’Analekta, M. Labbé ne souhaite rien laisser au hasard et tient à ce que ses éditions soient régies par un administrateur professionnel : le groupe Editorial Avenue. « Étant la plus importante maison de disques classique au Canada, nous sommes marginaux et avons peu de compétition. Tant que ce sera ainsi, je préfère confier le travail d’édition à des professionnels qui possèdent déjà une infrastructure administrative complète et qui connaissent le milieu beaucoup mieux que nous. C’est simplement une façon de nous simplifier la vie. Ils ont la compétence pour bien faire le boulot. De notre côté, on n’a pas à réinventer la roue pour un catalogue qui demeure, somme toute, assez petit, » soutient-il.
Conjoint d’Angèle Dubeau (dont il est aussi le gérant et producteur) et membre du Conseil d’administration du Musée d’art contemporain de Montréal et de la Commission du disque et du spectacle de la SODEC, M. Labbé a aussi siégé au conseil d’administration de l’ADISQ pendant quelques années (jusqu’en 2009). Il est parfaitement conscient que les éditions dans l’univers de la musique classique font bande à part. Avec une centaine de titres de compositeurs d’ici, le catalogue des Éditions Analekta grandit lentement mais sûrement. « Il est normal que les éditions progressent à un rythme lent parce que le consommateur de musique classique va majoritairement écouter et consommer de la musique de compositeurs issus du domaine public. Bach, Beethoven, Vivaldi demeurent des superstars à l’échelle mondiale tandis que des gens comme François Dompierre, même s’ils demeurent très respectés, sont moins consommés, » explique-t-il.
En ce qui a trait aux commandes, ce sont les musiciens eux-mêmes qui s’en occupent. « Ils se chargent de demander une œuvre à un compositeur, puis la commanditent. C’est leur travail. De notre côté, on va payer et participer à l’édition en devenant coéditeur avec les musiciens afin d’assurer une pérennité à l’œuvre. On procède de la sorte sept ou huit fois par année, » assure-t-il.
Ne cherchant pas à tout prix à dénicher de nouveaux compositeurs de musique instrumentale, M. Labbé estime que l’avenir des Éditions Analekta se résume, ni plus ni moins, à un work in progress. « On se laisse porter par la vague, tout simplement. Je ne prétends pas être un éditeur au sens professionnel du terme. Je ne vais pas prendre une œuvre, la développer et la mettre en marché comme plusieurs font. C’est toujours à l’intérieur d’un projet particulier que va se développer le besoin d’aller chercher une œuvre nouvelle. Ces projets se façonnent d’abord sur le plan artistique, et ensuite, si le besoin se fait sentir, on commande une œuvre ou on assimile une œuvre déjà existante à un projet. C’est à ce moment que l’édition entre en jeu. Sinon, c’est presque par accident que l’on a décidé de développer cet aspect! » Dans une classe à part, les Éditions Analekta…