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Avec aplomb, pas mal de soul et une silhouette de libellule, Roxanne Potvin a le blues au corps, depuis trois albums déjà, et un quatrième enregistré en compagnie de Sue Foley (Time Bomb, 2007), un mentor pour celle qui, après quatre années à Toronto, vient d’emménager à Montréal. « C’est par Jonny Lang que j’ai découvert le blues. J’avais quinze ans, j’étais une adolescente pleine d’hormones et il y avait ce gars très cute qui chantait à la télé… Ma première réaction, ça a été de dire : “Euh… Allô!” Mais il mettait tellement d’émotion dans ce qu’il faisait que j’ai eu envie d’aller plus loin. »

 

Pour Roxanne Potvin, la musique et certains groupes en particulier ont toujours eu des airs d’obsessions. « Avant le blues, j’ai eu ma période Beatles. J’écoutais rien que ça, ma chambre à coucher était un musée dédié à leur œuvre. Plus petite j’avais fait la même chose pour New Kids On The Block! Mon autre grande passion musicale, c’est le vieux rock & roll des années 50, Little Richard et Elvis… Quand j’ai découvert que le rock découlait du blues, un nouveau monde de musique m’est apparu. » À partir de là, Roxanne a eu envie de voir la vie en bleu : « C’est tellement cru, tellement vrai, l’émotion est tellement profonde quand t’écoute du blues… Je pense que c’est justement ça qui m’a interpellée. Peut-être que c’est la simplicité de la forme qui permet à l’émotion de se transmettre si vivement, je ne sais pas… En tout cas pendant les huit années qui ont suivi, j’ai exploré le blues et tous ses dérivés : jazz, gospel, soul, r n’b… »

 

Doux poison

 

Son plus récent album, No Love For The Poisonous, est paru en 2008, au sortir d’une phase tourmentée : « Je me posais beaucoup de questions, j’étais plongée dans une période de changements. » Bien des albums composés dans la vingtaine portent la marque de ces profondes mutations, d’une métamorphose vers l’âge de la maturité et qui implique un exorcisme des derniers échecs amoureux. Pensons à Cat Power ou Martha Wainwright par exemple. « Oui, ce sont des thématiques difficiles à contourner. Mais dans mon cas ça allait plus loin que la question des relations amoureuses laborieuses. Il s’agit d’un album introspectif, témoin de mes doutes, incertitudes et insécurités; je ne savais pas où j’en étais, encore moins où je m’en allais. »

 

Intituler l’album No Love For The Poisonous (comme la chanson qui y figure), est une suggestion de son gérant à laquelle Roxanne s’est d’abord opposée : « Je trouvais ça sombre, trop fataliste. Mais je me suis ravisée et aujourd’hui je le trouve parfaitement approprié. » Qui sont ces pauvres empoisonnés à qui l’amour se refuse? « C’est une chanson dans laquelle je raconte que lorsqu’on se laisse anéantir par ses doutes et ses idées noires, parfois on s’engouffre si profondément qu’on ne voit plus l’amour qui est là quand même, autour de nous, et qu’on en vient à le repousser. En d’autres mots : si t’es dans le noir et que tu ne fais rien pour essayer d’en émerger, c’est sûr que tu verras pas la lumière. »

 

Comme de nombreux résidents de l’Outaouais, Roxanne Potvin est parfaitement bilingue. Sauf quelques jolies exceptions, c’est dans la langue de Leonard Cohen qu’elle écrit. « Je suis à l’aise dans les deux langues, mais comme mes influences étaient en grande majorité des artistes anglophones, j’ai penché vers l’anglais. Mais j’aime écrire en français, ça me permet d’explorer autre chose. » Sur la chanson « Je t’aime », Roxanne Potvin enlève sa carapace et assume sa vulnérabilité, la revendique. « Mes deux chansons en français – celle-ci et “La Merveille”, avec Daniel Lanois sur The Way It Feels – parlent d’amour. Le français va chercher mon côté romantique, c’est si doux, ça me rend sentimentale. J’écris alors à partir d’une autre centre émotif… J’imagine que c’est en lien avec mon identité. »

 

Roxanne aime aller au fond des choses, décortiquer et analyser ce qui la fait vibrer. En arrivant à Montréal, elle s’est inscrite à des ateliers de chansons avec Robert Léger (Beau Dommage). « Après le dernier album, j’ai fait un effort conscient pour me perfectionner encore plus dans l’art d’écrire une bonne chanson. Maintenant j’ai une meilleure compréhension du processus, techniquement parlant. Écrire une chanson, ça va plus loin que se vider le cœur. On met le doigt sur une émotion et on veut la faire ressentir… Il y a des rouages derrière tout ça et c’est intéressant d’aller explorer comment ça marche de l’intérieur. » Pas de doute, Roxanne Potvin, chanteuse blues et chirurgienne dans l’âme, est la grande spécialiste des opérations à cœur ouvert.