Installé dans son studio de la rue Coloniale à Montréal, Paul-Étienne Côté a toutes les raisons du monde d’avoir le sourire aux lèvres. Le jeune compositeur a une feuille de route fort garnie, jalonnée de réalisations en France où il signe la musique de quatre séries distribuées à travers le monde, soit Team Galaxy, Monster Buster Club, SpieZ! Nouvelle Génération et dernièrement, Redakai. Au Québec, le trentenaire besogne sur quelques séries dont lol:-) et de multiples annonces publicitaires grâce à l’agence L’Oreille. De toute évidence, le travail ne manque pas pour Paul-Étienne Côté, qui compte maintenant deux employés dans ses studios Circonflexe. Une réussite enviable qu’il obtient à coup de ténacité et d’heures de travail non comptées. Ce succès a d’ailleurs été souligné lors du dernier Gala de la SOCAN, où il remportait un prix dans la catégorie Musique de télévision, volet international.

« Même si j’essayais de reprendre le même chemin, j’en serais incapable. J’aime bien citer Otis, personnage du film Astérix et Cléopâtre qui se fait demander si scribe est une bonne situation. Il répond : “C’est d’abord une série de rencontres.” Ça ne pourrait mieux résumer ma réalité. » Pour Paul-Étienne Côté, le point de départ se trouve dans un café du Vieux-Montréal, Olive & Gourmando. « J’ai étudié le violon jazz à l’Université McGill en même temps que la gang d’Arcade Fire. C’était bien, mais étrangement, l’enseignement de la musique t’amenait à jouer sur des bateaux de croisière ou des spectacles pas payants dans les bars. » Comme serveur chez Olive & Gourmando, le volubile et sympathique Paul-Étienne réalise une tonne de rencontres qui sont, encore aujourd’hui, la base de son carnet d’adresses. Il y croise des personnalités connues comme Daniel Bélanger, des réalisateurs et des producteurs avec qui il débute des relations de travail. « Éric, le propriétaire d’Olive, m’avait donné des billets pour un 5 à 7 à l’Hôtel Gault. Je me suis retrouvé au bar à côté d’un client. Et drôle de hasard, il était producteur pour des séries d’animation et il connaissait une superviseure française de musique à la recherche de compositeurs québécois. Tout ça a déboulé sur une rencontre alors que j’avais prévu de partir pour Los Angeles pour voir ce qui se passait là-bas. »

Malgré la petitesse de ses précédentes installations de la rue Saint-Urbain, son travail séduit Jennifer McCann, productrice musicale de la très grande boîte française de séries d’animation Marathon. Mais tout ne roule pas aussi vite que prévu. Alors que Côté rêvait de signer l’ensemble de l’habillage sonore de la série Team Galaxy, on ne lui assigne qu’une partie des tableaux. « Le réalisateur français qui est venu chez moi avec ses petits souliers Prada ne pouvait s’imaginer que la musique d’une série de 26 millions allait être composée dans un petit appartement de la rue Saint-Urbain. Il m’a brisé le cœur. »

La suite des choses révèle bien toute la force de caractère de Côté. De cinq minutes par épisode, il conçoit, petit à petit, 25 minutes de musique par épisode de Team Galaxy. Pour Monster Buster Club, bien qu’il perde la présentation devant les producteurs, Marathon le rappelle en désespoir de cause. Le premier choix ne livrant pas la marchandise, Côté compose finalement plus de la moitié de la musique de la série. Dès lors, son nom circule chez Marathon et les bons mots fusent. Lorsque le troisième projet survient, SpieZ! Nouvelle Génération, la chance lui sourit. Le compositeur québécois gagne le concours devant une dizaine d’équipes basées partout sur la planète et conçoit la signature sonore de 52 épisodes. À la deuxième saison, Côté doit s’ajuster à la nouvelle charge de travail : « J’ai crié à l’aide… » Il part à la recherche d’un collaborateur et rencontre Maxime Barzel, à l’époque un jeune stagiaire, aujourd’hui proche partenaire à la composition.

Quand on le questionne sur sa signature sonore, Côté n’a pas de réponses claires. S’il parle d’un son frais et jeune, on le sent fébrile quant à la suite des choses et ce, malgré son jeune âge. « Ce qui m’angoisse, c’est que le son de quelqu’un est éphémère. Je le sais car j’ai moi-même remplacé des gars super talentueux. Je suis sur le marché depuis 2005. Et on dit ici que ton heure de gloire dure 10 ans. Il ne me reste que trois ans pour mettre les bouchées doubles. » Celui qui mène de front la business et la création depuis les tout débuts, a bien envie maintenant de conquérir le marché américain. En plus d’un voyage à Los Angeles, Paul-Étienne élabore déjà la nouvelle phase de ses studios, soit la mise en ligne d’un site Internet et la recherche d’un nouvel espace de travail plus spacieux. « Je ne laisse rien dans les mains du hasard, je négocie mes contrats, je me déplace pour rencontrer avec qui j’aimerais travailler. Il n’y a pour moi aucune autre voie. »