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Assurément, le compositeur et multi-instrumentiste Simon Carpentier aime la vie et adore son métier. Parallèlement à ses études en médecine qu’il délaissera pour le Conservatoire, il fait ses débuts comme musicien, avant de s’acheter, avec des copains, un studio et des locaux de répétition. Une période durant laquelle il compose peu — la nuit, pour des boîtes de publicité —, mais qui est féconde en apprentissages.

 

Un peu avant le début du siècle, il quitte Québec et le milieu publicitaire pour adopter Montréal et explorer d’autres univers. D’entrée de jeu, les projets musicaux se succèdent et se multiplient : séries télévisées, courts et longs métrages, pièces de théâtre, la scène — dont Zumanity et Wintuk, pour le Cirque du Soleil —, voire de la musique country et pour enfant. Il croit que s’il a été aussi chanceux jusqu’à ce jour c’est, entre autres choses, le fait qu’il ressent un réel plaisir à travailler avec les gens. Une valeur ajoutée, en quelque sorte, à laquelle on semble être sensible.

 

Plus récemment, Simon Carpentier a travaillé, à Londres, sur le dernier spectacle d’Arturo Brachetti, « un projet assez complexe », de même que sur la pièce L’Imposture, d’Évelyne de la Chenelière, mise en scène par Alice Ronfard au TNM. Il a aussi créé, également cet automne, la musique du spectacle de Montréal et l’habillage musical de la mission sociale poétique sans frontières De la Terre aux étoiles pour l’eau.

 

« Ç’a été un défi énorme, » relate le compositeur, qui n’a eu que trois semaines pour concevoir, composer, arranger, réaliser et enregistrer le tout. « Guy (Laliberté) est un collaborateur complètement fou. Ce gars-là m’a appris beaucoup de choses. Et, par l’entremise du Cirque, j’ai appris à aimer encore plus la planète, » précisant qu’il a ainsi eu l’occasion de travailler avec des créateurs de différentes nationalités. « Et Guy, sa plus grande qualité, lorsqu’il fait confiance à quelqu’un… c’est épeurant ! J’ai beaucoup d’estime pour lui, pour tout ce qu’il a réussi à faire. »

 

Simon Carpentier adore virevolter du cinéma à la scène, en passant par la télé, le théâtre et le chapiteau, des univers qui font appel à des méthodes de travail particulières. Ses sources d’inspiration ? « Les lieux et la mémoire des lieux. Observer les gens, comment ils s’habillent, dansent, bougent ; ça aussi ça m’inspire beaucoup, » mentionne cet émule d’Ennio Morricone. « La musique, je la vois. Pour moi, la musique est quelque chose de concret. C’est très visuel. »

 

Entre trois projets menés de front ou deux séjours à l’étranger, il se réfugie auprès de sa compagne, l’auteure-compositrice-interprète Anna Liani, et de ses enfants, à la campagne, où il s’est aménagé un studio. Bien qu’il se soit promis de passer « un Noël blanc » avec sa famille, après avoir travaillé sans arrêt depuis des années, il poursuit et achève actuellement un projet personnel multimédia entrepris il y a cinq ans. Le tout devrait être terminé pour 2011. « Ça prend le temps que ça prend. Chaque nouveau projet est toujours un défi. » D’autant plus que les délais de production sont, déplore-t-il, de plus en plus courts. Ceci enlève souvent la possibilité de prendre du recul par rapport à une création, en plus de ne pas faciliter la vie des créateurs de la relève.

 

Quelques conseils pour ceux-ci ? Bien cibler les personnes auxquelles on désire offrir ses services, « afin de créer un minimum de tourbillon autour de soi », prendre des risques, ne pas céder aux discours de peur face aux « méchants producteurs qui ne payent pas leur monde ». Oui, il admet en avoir connus, mais ils demeurent, selon lui, marginaux. « Moi, j’ai fait fi de ça. J’ai toujours partagé ma musique sans compter. Je me suis toujours donné de la même façon dans tous les projets que j’ai faits. Je dirais à un jeune : fonce, informe-toi, entre dans une association comme la SOCAN, car ces gens-là sont là depuis longtemps et ils sont là pour t’informer. Et n’aie pas peur. Fonce et travaille ! Donne-toi. Vas-y ! Fais tes erreurs. Ne compte pas et tu vas le payer ton loyer, tu vas manger, tu vas y arriver, » assure Simon Carpentier, qui ajoute n’avoir jamais fait de demande de subvention. Volubile, débordant d’énergie et d’enthousiasme pour son métier, il ajoute à sa liste de conseils la capacité de se réinventer, d’assumer ses choix. Et de se sentir privilégié de faire ce que l’on aime dans la vie. « Si c’est vraiment un appel, il faut être prêt à faire le saut et plonger. Et si ça ne se passe pas au Québec, ça se passera ailleurs ! »



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Après avoir trimballé ses platines aux quatre coins de la planète pendant une dizaine d’années et fait danser les foules dans les clubs les plus huppés, la Sicilo-Québécoise Misstress Barbara (née Barbara Bonfiglio) débarque avec un premier disque de compositions originales, I’m no human. Si l’idée d’écrire des chansons germait dans son esprit depuis un certain temps, c’est la mort de son père, la veille de Noël 2006, qui incita la jeune femme à exprimer ses émotions refoulées. « Ce fut l’élément déclencheur. Je n’avais jamais vécu une peine aussi étrange et profonde que celle-là. J’étais vraiment secouée et le jour de Noël, seule dans mon lit, j’ai rédigé un poème pour mon père. Celui-ci est sorti avec une aisance incroyable. Par la suite, j’ai décidé d’exprimer ma peine avec d’autres textes, mais je ne pensais pas ajouter de la musique pour en faire des chansons. Je suis très curieuse de nature et j’aime apprendre. Il manquait l’écriture de chansons à ma palette de talents, » avance la volubile jeune femme..

Sans pour autant renier ses racines électro et house, Barbara choisi donc de poursuivre sa route dans des avenues plus pop et accessibles. Ayant produit de la musique depuis 1999 et fait paraître plus de 30 maxis, la Montréalaise considérait que le temps était venu d’effectuer un virage musical, de surprendre ses fans et de mettre sa carrière de D.J. en veilleuse. « Beaucoup de gens pensaient que je n’étais que D.J. même si on retrouvait toujours quelques pièces originales sur chacune de mes productions. Il était temps de changer de peau, de prendre mon envol. Pour moi, un album c’est une histoire et construire un album prend beaucoup de temps. Je n’avais jamais refusé de gigs pour m’enfermer en studio pendant six mois. Lorsque j’ai décidé de faire ce disque, j’ai été forcée de modifier ma façon de travailler. À vrai dire, j’ai tout appris avec ce projet. »

En effet, la jeune femme a mis de côté ses 11 ans de métier de D.J., troqué ses platines pour un micro, puis a décidé de chanter en français, en anglais et en italien sur I’m No Human. Celle qui s’est acheté une guitare Martin et qui a suivi des cours de chant il y a deux ans devait s’adapter à de toutes nouvelles méthodes de travail. « À la base, je suis une programmeuse. J’ai commencé par trouver de bons beats et de la basse. Ensuite, j’ai cherché des sonorités, un travail de longue haleine. Je n’écris pas de paroles pour de la musique déjà composée. Preuve que je ne viens pas de ce milieu de songwriters. Je fouille plutôt dans mes textes et musiques pour voir ce qui peut aller ensemble. Ce que je déplore des artistes qui intègrent de la musique électronique à la musique pop, ce sont les sons faciles. La techno est comme un film indépendant européen et la trance, c’est un film hollywoodien. Ça vend plus. C’est plus accessible, mais on ne se force pas à essayer de trouver quoi que ce soit de nouveau. Moi, ça ne m’attire pas, » avoue-t-elle.

Celle qui a grandi avec la musique italienne de variétés des années 80, Charles Aznavour et les Beatles, s’est entourée de collaborateurs de choix pour ce nouveau projet : Bjorn (de Peter, Bjorn & John), les Brazilian Girls ainsi que Sam Roberts. Véritable passionnée de musique, la Montréalaise de 33 ans souhaite mettre de l’avant ses talents de productrice au cours des prochaines années. « Avec ce disque et le prochain, je veux faire comprendre aux gens que je suis essentiellement une productrice. J’aimerais qu’on m’approche pour faire des remix, programmer, écrire pour d’autres artistes. Mais avant tout, j’aimerais beaucoup fonder une famille et je sais que ça nécessite beaucoup de temps, » avance la dame, un sourire dans la voix. Elle poursuit : « J’ai toujours pensé arrêter ma carrière de D.J. autour de 35 ans. Il faut être réaliste. L’univers des D.J. est très ingrat. Tu peux sortir d’une clique très rapidement. Tu vieillis, mais le public demeure jeune et très au courant de la musique qui voit le jour. Tu dois être en mesure de te renouveler, sinon on te pousse. Si je suis encore là, c’est que j’ai réussi à m’adapter et à évoluer. »

Amorcées à Los Angeles et terminées à Montréal en 2007, les sessions d’enregistrement d’I’m No Human se sont échelonnées sur plusieurs mois. Fondatrice du label techno Relentless Music en 1999 (rebaptisé Iturnem, quatre ans plus tard), Barbara se dit satisfaite de cette première expérience prolongée en studio pour cet album : un avant-goût à son public et son équipe de ce qu’elle veut faire à partir de maintenant. « Dorénavant, je vais être moins gênée de composer quelque chose de pop et d’avouer que c’est quétaine ! Ça me dérangera moins de naviguer dans ces eaux. Je dois conditionner mon esprit à écrire des chansons qui vont toucher le cœur des gens et moins me forcer pour que ce soit underground. Je veux me faire plaisir, me laisser aller, » affirme la D.J. globe-trotter.

En plus d’entretenir des discussions avec plusieurs étiquettes en France et en Angleterre afin de faire paraître l’album outre-mer en 2010, Misstress Barbara souhaite essentiellement présenter ses nouvelles compositions dans le plus de salles possibles. Cependant, un gros défi l’attend. « Beaucoup de gens, particulièrement les promoteurs de salles, ne comprennent rien. À cause de mon passé de D.J., je suis toujours à cette étape de me faire connaître en tant qu’auteure/compositrice et ça prend plus de temps que prévu. J’essaie de leur faire comprendre que je chante et que j’ai un groupe. Oui, je vais devoir faire quelques premières parties, mettre le feu aux salles et laisser le bouche à oreille faire le reste, mais ça ne me dérange pas. Qu’on se le dise, je suis là pour rester. »

 



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Pour Denis Wolff, tout démarre par un amour passionnel de la musique, un achat compulsif de disques, la fréquentation des salles de spectacles. À 21 ans, déjà, il commence à travailler dans l’édition musicale : « J’ai quitté Montréal pour Paris afin de tenter ma chance et voir le monde, explique aujourd’hui l’homme de 53 ans. J’y ai trouvé un emploi chez un éditeur qui gérait les éditions de Michel Fugain. » Pendant les années punk, Wolff séjourne à Londres, puis revient à Montréal en 1984 pour faire de la gérance avec Men Without Hats. Il rencontre Michel Bélanger et se joint à Audiogram pour faire de la direction artistique (Jean Leloup) et de l’édition.

 

Denis Wolff nous reçoit dans ses bureaux montréalais, où on trouve un studio d’enregistrement qui a connu pas mal de passages : Arthur H, Lhasa, Pierre Lapointe, entre plusieurs autres, y ont tous mis en boîte au moins des fragments de leurs disques. Sans oublier Alexandre Désilets, dont Wolff est l’éditeur.

 

« Les éditions musicales, ça couvre large. Un premier élément, c’est la découverte de talents. Un deuxième, c’est trouver des débouchés pour leur musique. Qui sont ces artistes? Qu’est-ce qu’ils ont à dire? À qui s’adressent-ils? On doit aider les auteurs-compositeurs à placer leurs chansons auprès d’interprètes. Pour certains, il faut revoir les textes ou revoir les structures musicales. C’est un travail artistique de fond, il faut comprendre le matériel. Si c’est un auteur-compositeur-interprète, on doit essayer de lui trouver un contrat de disques. Il y a aussi des notions de droits, le droit d’auteur, avec lesquelles je suis à l’aise et que j’aime bien. »

 

Des décennies après ses débuts dans le métier, Wolff carbure encore à la passion, et c’est elle qui l’aide à choisir ses associés : « J’y vais selon mes coups de cœur artistiques. Ça ne me vient pas à l’esprit de savoir si c’est commercial ou non. Parfois, ça m’a bien servi, d’autres, non… En ce moment, je travaille beaucoup avec Alexandre Désilets. Il y a aussi Jean-Philippe Sauvé. Et enfin, je collabore avec des compositeurs qui font de la musique pour l’image, téléséries, films. Des gens comme Mathieu Vanasse, Jean Massicotte. Ce sont parfois des coproductions avec l’Europe ou d’autres destinées au marché américain. »

 

Il s’agit d’un métier de longue durée que celui d’éditeur, bâti patiemment : « Pour placer nos œuvres, c’est un réseau qui se construit avec le temps. On se spécialise là-dedans, alors on sollicite les gens, mais c’est toujours à recommencer car il y a des nouveaux joueurs. » Ces dernières années, Wolff se consacre davantage à son métier d’éditeur avec sa compagnie Ho-Tune Musique (qui existe depuis près de vingt ans) qu’à ses fonctions de réalisateur artistique. Avec la démocratisation du matériel d’enregistrement personnel, les artistes ont moins tendance à embaucher des services extérieurs.

 

« La musique, il faut qu’elle voyage, qu’elle soit diffusée, » croit également Wolff. « Parfois des artistes viennent me voir pour collaborer avec moi, j’en découvre d’autres par les journaux, le web ou des spectacles. Dernièrement, j’ai eu un coup de cœur pour la rencontre entre un musicien (Boogat) et un poète/slameur (Mohammed), nous allons travailler ensemble. Pour 2010, nous continuons les projets de musique de films, ainsi que pour Internet. »

 

À ne pas négliger dans les plans imminents de Wolff, un deuxième album pour Alexandre Désilets, un des talents les plus prometteurs de la nouvelle chanson québécoise : « Des choses sont prévues avec lui pour la France, des spectacles. Mais il y a aussi des musiques de film qui, elles, voyagent. Au-delà de la recherche de talents, le plus gros challenge, pour un éditeur à l’ère numérique, c’est de travailler avec des sociétés de gestion, d’être proactif. Dans le futur, il faut qu’il y ait de nouvelles sources de revenus pour le monde numérique. La musique des artistes doit se retrouver dans plein d’endroits différents. Internet est une arme à double tranchant : ça permet la diffusion instantanée de contenus, la qualité semble toujours faire surface, mais d’un autre côté, la réglementation internationale n’est pas au point. Les éditeurs travaillent fort avec les sociétés pour mettre ça en place. Tout le monde va en bénéficier. »

 

Dans les bureaux de Denis Wolff, un silence bref s’installe. Ça mijote. Comment se vivra la musique de demain, le quotidien des artistes? Quels rôles auront leurs éditeurs? L’avenir est ouvert, plein de promesses. Il suffit de l’imaginer.