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Depuis longtemps, elle sème, ratisse, bichonne. Aujourd’hui, Natalie Byrns récolte. Ce qui donne Carnets d’insomnie, deuxième opus très réussi de l’auteure-compositrice-interprète de 36 ans, aux accents folk-pop. Un album planant et atmosphérique, qui réunit comme dans un bouquet tous les talents de cette femme-orchestre : l’écriture, la composition, le chant, le théâtre et, dans la foulée, le spectacle. « Ce qui caractérise mon parcours, c’est ma passion vibrante pour la scène, avoue-t-elle. J’adore raconter des histoires, aussi bien dans une chanson de trois minutes que dans un show à grand déploiement. C’est ça qui m’anime. »

Formée au Conservatoire d’art dramatique de Québec, la native de Thetford Mines prend rapidement la tangente de la musique. « Mon père écoutait Patsy Cline et Connie Francis. Ma mère, Ferland, Charlebois, Vigneault. J’ai appris le piano, tout en trippant sur les grands des années 70… La chanson a toujours été en moi. Mais j’avais envie de toucher à tout – théâtre, clown, travail du corps, analyse de textes. Mes meilleurs souvenirs du Conservatoire, ce sont les cours de poésie. Dire un poème devant un public, c’est très proche du travail de chanteur soliste. »

La voix chaude de Natalie la lance d’abord sur une trajectoire de chanteuse. On l’entend dans la trame sonore d’un film de Disney. Elle obtient le Prix de la presse au Festival international de la chanson de Granby de même que la palme d’interprète, le coup de cœur du public et le Prix du Roseq au Tremplin de Dégelis. La troupe Québec Issime lui confie bientôt le rôle de la mère Noël dans la superproduction Décembre, qu’elle reprend d’ailleurs depuis.

D’autres spectacles musicaux apparaîtront plus tard sur sa feuille de route, comme Showtime et Un violon sur le toit. Et pourtant… « Je rêvais d’être auteure- compositrice-interprète. J’ai toujours écrit des poèmes. Au Conservatoire, j’ai créé des chansons, mais qui allaient dans tous les sens. J’ai pris des détours avant de revenir à l’écriture. » Le déclic se fait pendant un séjour en Asie, comme soliste d’un band. « Là-bas, un des musiciens m’a offert une composition. J’ai alors compris que je devais me laisser inspirer par la musique. Cette mélodie a donné “Filer sur le vent”, une chanson du premier album, paru en 2007. » L’idée de ce disque lui vient d’une photo d’elle, prise à Macao à la tombée du jour. « Tout de suite, c’est le titre qui m’est venu en tête : Le Soleil sur l’épaule. De là j’ai imaginé un recueil de voyage, qui parlait aussi du vent, de la mer, des volcans. » Réalisé par Francis Covan, l’album privilégie les instruments acoustiques.

Carnets d’insomnie, lancé en mai sous le label Iguane Records, a lui aussi mûri à partir du titre. Natalie en signe tous les textes, assonants et consonants, et la moitié des musiques, en plus de jouer du piano. « J’ai observé mes insomnies et celles des autres. Même si le ton est intime, le “je” est tour à tour personnel et personnage. » Avec ses complices Christian Bernard à la composition et Bruno Labrie aux arrangements et à la réalisation, elle invente un univers nocturne enveloppant, lucide ou onirique, qui évoque l’inspiration créatrice, l’alcool et la drague, le mal d’amour ou le vertige de la maternité (juste avant l’arrivée du petit Raphinou). Avec, ici et là, des pointes de dance (« Coca Loca », premier single), de R & B (« Sous le lit ») et même une parenté avec Sheryl Crow (« Falling In Lust », seule pièce anglaise). « Je voulais m’éloigner du folk pur, aller vers un style plus pop, mais avec des loops organiques, réalisés avec des grains de café, des pinceaux, des chaînes… »

Fan d’Andrew Belle, de Patrick Watson, Martin Léon et Luc De Larochellière, Natalie rêve de composer des musiques de films, veut offrir ses chansons à d’autres et continuer de créer pour elle. « Écrire, chanter, c’est viscéral. Parce que chaque fois que je monte sur scène, il y a une rencontre… Pour mon prochain album, je veux continuer à jouer avec les personnages et me servir de tous les outils que j’ai acquis comme interprète. »

L’espace francophone est aussi dans sa mire. Encore là, l’artiste cultive la patience dans l’esquisse de son plan de match. « Je ne crois pas au hasard. J’ai fait tout un parcours pour arriver jusqu’ici. Si je n’avais pas produit mon premier album, Nicky Estor ne m’aurait pas entendu chanter au P’tit Bar ni proposé de faire partie de sa maison de disques. Je me vois comme une late bloomer. Pour chaque fruit que je cueille, j’ai mis beaucoup d’heures dans mon jardin. »